Accès direct sans ordonnance, tarifs toujours sous perfusion, installation de plus en plus encadrée, kinés appelés à boucher les trous du système de santé… La profession avance, mais rarement là où elle l’avait prévu. En 2026, plusieurs lignes pourraient encore bouger. Pas forcément dans le bon sens, ni dans le mauvais, mais suffisamment pour que Topaze vous propose un arrêt sur image.
Comment décrire 2025 ?
S’il fallait résumer l’année 2025 pour les kinésithérapeutes et, plus largement, pour les professionnels de santé, un mot suffirait : instable. Changements de gouvernement, lois de financement de la Sécurité sociale réécrites à la dernière minute, arbitrages budgétaires souvent défavorables… La santé a passé l’année à naviguer à vue. Comme depuis plusieurs années finalement, on ne change pas les mauvaises habitudes.
Dans ce contexte en France, difficile de se projeter sereinement. Et pourtant, 2026 arrive déjà, avec son lot de réformes annoncées, repoussées ou encore floues. Accès direct, revalorisations, conditions d’installation, organisation des soins… Sans promettre une révolution, l’année à venir pourrait bien rebattre certaines cartes. Voici donc les quatre (principaux) points qui pourraient évoluer concernant la kinésithérapie en France, en 2026.
L’avenant 8 (et oui, un autre avenant !)
L’avenant 8 à la convention nationale des masseurs‑kinésithérapeutes est une mise à jour récente du cadre conventionnel qui encadre l’exercice libéral des kinésithérapeutes, publiée au Journal officiel fin 2025. Il vise principalement à sécuriser juridiquement les revalorisations tarifaires déjà négociées, en ajustant leur calendrier et en clarifiant certaines règles de cotation et de facturation, après une période d’incertitude due à une alerte sur les dépenses de santé. Bien que ces revalorisations ne produisent pas d’effet tarifaire immédiat, elles sont programmées pour entrer en vigueur progressivement dès 2026. Cela offre une meilleure visibilité économique et une facturation plus fiable pour les praticiens. Pour en savoir plus sur les changements concrets apportés par cet avenant, vous pouvez consulter l’article complet ici : Avenant 8 à la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes : ce qui change (vraiment) pour vous – Topaze
Accès direct au kiné : une expérimentation qui change la donne
L’accès direct au kinésithérapeute, longtemps cantonné aux débats syndicaux et aux rapports ministériels, est progressivement devenu une réalité de terrain. Et c’est une bonne chose. En effet, depuis la loi Rist 2 promulguée en mai 2023, une expérimentation permet aux patients de consulter un kiné sans prescription médicale, à condition que le professionnel exerce dans une structure coordonnée, le plus souvent une CPTS ou une maison de santé. En 2025, cette expérimentation a été étendue et consolidée, avec l’ambition affichée de désengorger la médecine de ville et de faciliter l’accès aux soins de rééducation.
Concrètement, le kiné devient le premier interlocuteur pour certaines pathologies musculo-squelettiques simples. Il évalue, décide de la prise en charge ou, le cas échéant, réoriente vers un médecin. Pour la profession, c’est un pas important vers une reconnaissance accrue des compétences cliniques de la kinésithérapie. Une autonomie qui s’accompagne aussi de responsabilités supplémentaires telles que la traçabilité, coordination, critères d’inclusion stricts.
Pour cette nouvelle année, on devrait être dans la continuité des trois dernières. La question ne sera donc plus de savoir si l’accès direct est possible, mais s’il sera pérennisé, élargi ou au contraire freiné. Une chose est sûre : cette évolution redéfinit la place du kiné dans le parcours de soins.
Réformes conventionnelles et revalorisation tarifaire : l’attente prolongée
La revalorisation des actes de kinésithérapie est devenue un serpent de mer. Annoncée, négociée, puis reportée, elle a rythmé l’année 2025 au gré des arbitrages budgétaires. Initialement prévue à l’été, la hausse tarifaire a finalement été repoussée à janvier 2026, officiellement en raison du dépassement de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie. Une décision vécue comme un nouveau coup de froid pour une profession dont les tarifs stagnent depuis plus d’une décennie. Pourtant, les besoins sont bien identifiés : prise en charge du vieillissement, explosion des pathologies chroniques, augmentation du temps passé par patient. Les négociations conventionnelles engagées fin 2025 portaient sur des objectifs clairs, à savoir une meilleure valorisation de certains actes, la reconnaissance de la complexité de certaines prises en charge et une adaptation de la nomenclature à la réalité du terrain.
En 2026, l’enjeu sera donc double : voir si les engagements sont tenus, et surtout si ces revalorisations permettront réellement d’améliorer l’attractivité du métier, notamment dans les zones sous-dotées. Le risque, sinon, est de continuer à demander toujours plus aux kinés, sans compensation à la hauteur.
Installation des jeunes diplômés : la liberté sous conditions
Autre sujet sensible et pas des moindres, l’installation des jeunes kinés en France. Face aux inégalités territoriales, les pouvoirs publics ont progressivement durci le discours. L’idée d’un passage obligé par un exercice salarié ou en zone sous-dotée avant toute installation libérale a gagné du terrain en 2025 et pourrait bien se concrétiser en 2026, sous la forme de dispositifs incitatifs renforcés, voire possiblement de contraintes réglementaires.
Pour les nouveaux diplômés, le message est clair : la liberté d’installation ne sera plus totalement automatique. L’objectif affiché est d’améliorer l’accès aux soins là où les besoins sont les plus criants. Une mesure qui est loin de faire l’unanimité dans la profession et qui divise. En effet, certains y voient un effort collectif nécessaire, d’autres une remise en cause de l’attractivité de la profession.
L’enjeu, en 2026, sera de trouver un équilibre entre régulation et incitation, sans décourager une jeune génération déjà confrontée à des conditions d’exercice parfois précaires.
Accès aux soins et réorganisation du système de santé : le kiné au cœur du jeu
Enfin, 2026 devrait confirmer une tendance de fond : la réorganisation du système de santé autour des soins primaires. CPTS, maisons de santé, équipes de soins coordonnés… Ces structures, longtemps expérimentales, deviennent progressivement la norme. Les kinésithérapeutes y occupent une place de plus en plus centrale, notamment dans la prévention, la rééducation précoce et le suivi des patients chroniques.
Cette évolution répond à une logique simple : mieux utiliser les compétences de chaque professionnel pour faire face à la pénurie médicale. Pour les kinés, cela signifie davantage de coordination, de protocoles partagés, mais aussi une visibilité accrue auprès des patients et des autres soignants. En 2026, le défi sera d’éviter que cette réorganisation ne se traduise uniquement par des charges supplémentaires, sans moyens humains ou financiers adaptés. Car si le kiné devient un pivot du système, encore faut-il lui donner les outils pour tenir ce rôle sans s’épuiser.


